Chiennes

Elle courait Je l’ai vue courir J’ai vu le type en noir qui lui courait après Je l’ai vue se retourner pour voir le type en noir qui lui courait après J’ai vu l’angoisse agrandir ses yeux Et sa foulée

Vite Accélérer

Moi J’ai ralenti J’ai baissé la vitre J’ai ouvert la bouche à peine J'ai dit

Viens Monte

Elle a capté Regards croisés A ouvert la portière S’est jetée en travers A claqué la portière A dit Verrouille Accélère Il va casser ta vitre arrière

J’ai vu le type en noir ralentir Dans mon rétroviseur Le pas suivant Toujours plus lent Lâche ta chasse Lâche ta prise Lâche ta proie Lâche l’affaire

Lâche Tout court

J’ai repris la vitesse Pendant qu’elle reprend Lentement Sa respiration A tâtons Du bras de la voix elle a donné la direction loin loin loin Vers l’hôtel au fond

J’ai regardé la passagère Avec son fond de teint impeccable L'indécence de ses talons Ses cils interminables La royauté de sa poitrine Ses lèvres pulpe d’orange sanguine Sa jupe courte et légère Toute sa posture altière Là pour plaire

Ce qu’elle faisait sur le trottoir Avant la traque du type en noir

Pas de pute sur mon territoire

J’ai regardé la passagère Et même si moi je le suis pas Je crois qu’on est deux dans cette galère

Je crois qu’on fait la paire Quand on contrarie leurs affaires en plein air Pute si tu souris pas Pute si tu réponds pas Pute si tu dis non Quand on te reluque les tétons Pute quand tu prends la maille De ton travail

Pute

Aux yeux de la meute On est toutes des chiennes

Autant l’être ensemble

Qu’à la fin pour de vrai On se fasse place à toute heure Qu’on bitume nos présences Façon BTP en décolleté En gloss Doigt d’honneur dans la poche Talons plantés sur le pavé En guise de marteau-piqueur

Attends de voir Tôt ou tard On va se le faire ce putain de trottoir