Citations et autres récoltes


De la souffrance vient la sensibilité dont naît l’intelligence.

Tout le monde parle de savoir-vivre, mais personne du savoir-souffrir.

Ce qui importe ce n’est pas le poids qui t’accable, c’est comment tu te courbes pour ne pas casser.

Ce n’est pas le bruit qui t’abasourdit, c’est comment tu écoutes les murmures du monde.

Ce n’est pas la force du vent qui t’emporte, c’est comment tu hisses tes voiles.

Ce n’est pas la hauteur des vagues qui te frappent, c’est comment tu t’y laves.

Ce n’est pas l’absence de lumière qui t’entoure, c’est comment tu chantes dans le noir.

Ce n’est pas ce que tu perds, c’est comment tu ouvres ton cœur pour la suite.

Ce n’est pas la quantité de larmes que tu verses, c’est comment tu souris en pleurant.

Ce qui importe, ce n’est pas l’intensité du feu que tu traverses, c’est comment tu danses dans les flammes.

Stéphan Schillinge





Il n’y a véritablement de présence que par l’attention active et soutenue que nous portons à la réalité qui nous entoure. Chaque moment de conscience, chaque fragment d’existence recèle une sorte d’absolu. (...)

Cette attention aux choses, aux être pour eux-mêmes, n’est pas seulement le commencement de la prière, elle en est le sceau : l’homme et la femme qui prient libèrent un sentiment grandissant de la vie. L’ordinaire s’embrase à son contact.

Le cœur ne peut aimer que parfaitement éveillé·e. (...)

Chaque moment d’attention, de pleine conscience, se manifeste comme un retour à la source, autrement dit comme un nouveau départ, un nouvel essor. La poésie n’est pas autre chose que cet état de perpétuel éveil.

Philippe Mac Leod





Les grands feux sont une espèce en voie de disparition. Ils se propagent à la vitesse du vent et de la nuit. Leur souveraineté soumet l’espace. Pareils aux météorites et au désir, leur dangerosité, leur degré de combustion, leur trajectoire sont imprévisibles.

Dévastation. Régénération.

Nous sommes de même nature ; des feux.

Anne Dufourmantelle, L'Envers du feu





C'est une chose quand quelqu'un·e te dit : “je t' aime”. C'est une autre chose quand quelqu'un·e est témoin des parties de toi que tu penses être “impossible à aimer”, alors que pourtant il ou elle t'aime toujours.

Quand tu fais tomber le front, la façade, le masque, et que l'on t'aime encore plus.

C'est une chose d'être aimé·e. C’est une tout autre chose que d’être aimé·e pour qui tu es vraiment, pas seulement une image, une idée ou une attente posée sur toi.

Quand tu te sens vu·e, exposé·e à la lumière de l'amour, et que son amour reste constant et sûr. Quand tu as l'impression que tu n'as pas à cacher les parties “sales”, “honteuses”, “malades” ou “indignes” de toi-même, afin de garder cette personne proche de toi.

Quand tu peux te détendre, respirer, laisser tomber ta garde, et être ton soi authentique, sauvage et bizarre avec lui ou elle, sans avoir peur du rejet ou de la punition.

Quand tu te sens tout en leur présence chaleureuse, sans crainte d'être honteux·se, ridiculisé·e, jugé·e ou abandonné·e pour avoir révélé ton authenticité.

Ce n’est pas seulement l’amour que nous désirons ardemment, c’est cet amour inconditionnel féroce qui nous voit vraiment tel que nous sommes : imperfections, difformités, défauts, vulnérabilités, etc... Il voit nos ténèbres, il voit nos terreurs, et il dit toujours oui.

Prenez le risque d'être vu·e. Prenez le risque d'être connu·e. Prenez le risque d'être aimé·e.

Jeff Foster





Ce qu'on met de soi dans l'autre est infiniment plus vaste que ce qu'on croit lui confier. Quelquefois c'est sa propre vie, d'autres fois c'est son âme, sa vocation, sa sauvagerie, sa misère, une dette ancestrale, c'est toujours exorbitant, une valeur passée en douce, clandestine, que l'on s'échange dès le premier regard.

Anne Dufourmantelle, En cas d'amour





Aujourd’hui, chrysalide. Demain, papillon. C’est ce qu’il faudrait se dire chaque jour. Nous ne cessons jamais de naître à nous même.

Nicolas Dieterlé, La pierre et l’oiseau





A l'écart

de la douleur

une marge de plaisir

à vivre une attente

un meilleur à refaire


Annelyse Simao, À l'échafaudage





Il faut oublier des mots comme Dieu, la Mort, la Souffrance, l'Éternité. Il faut devenir aussi simple et aussi muet que le blé qui pousse ou la pluie qui tombe. Il faut se contenter d'être.

Etty Hillesum





Je sais si peu

À peine de deuil en deuil aller mon chemin

Le moindre éclair au détour m'illumine

Janine Modlinger, Veille





Au risque de l'inconnu

(…)

Au risque des nuits blanches.

Au risque d'écrire à un·e presque inconnu·e une lettre d'amour à partir d'un presque rien qui vous aura traversé dans une fulgurance inconnue de vous jusqu'alors.

Au risque de ne pas cesser de faire l'amour.

Au risque de prier sans le secours d'aucun Dieu, ou même avec.

Au risque de l'amitié, cachée, folle, éperdue, infinie. Pire qu'un amour.

Au risque de l'ennui, et aimer cet ennui sans secours.

Au risque de marcher seul·e dans une ville et attendre que survienne, à cet instant, le sens de toute une vie ; savoir que le lendemain tout disparaîtra.

(…)

Au risque de la joie.

Anne Dufourmantelle, Éloge du risque





Extrait d'une interview d'Anne Dufourmantelle par Marie Richeux, sur la passion. L'émission entière peut être écoutée ici.





Il faudrait retrouver le bonheur de s'aimer de loin, comme des inconnus. Avoir la même grâce que Jésus, la même innocence. La même chasteté. Ce ne sont pas les baisers que la chasteté empêche, ce ne sont pas les étreintes, ni les cheveux qui baignent les pieds nus et les bénissent. Ce qu'elle empêche c'est de déposséder quiconque de son histoire, de sa parole, de son secret. C'est de confisquer son voyage et de réduire sa vie à une chose utile ou même à une chose aidante. C'est de manger sa blessure, de l'étouffer au lieu de la veiller, et d'éteindre son rayonnement avec sa propre lumière.

Marie Laure Choplin, Jours de Royaume





La porte

Attendant et souffrant, nous voici devant la porte. S'il le faut nous romprons cette porte avec nos coups. Nous pressons et poussons, mais la barrière est trop forte.

Il faut languir, attendre et regarder vainement. Nous regardons la porte ; elle est close, inébranlable. Nous y fixons nos yeux ; nous pleurons sous le tourment ; Nous la voyons toujours ; le poids du temps nous accable.

La porte est devant nous ; que nous sert-il de vouloir ? Il vaut mieux s'en aller abandonnant l'espérance. Nous n'entrerons jamais. Nous sommes las de la voir... La porte en s'ouvrant laissa passer tant de silence.

Que ni les vergers ne sont parus ni nulle fleur ; Seul l'espace immense où sont le vide et la lumière. Fut soudain présent de part en part, combla le cœur, Et lava les yeux presque aveugles sous la poussière.

Simone Weil









Un jardin fou

Au cœur de notre exil, nous avons su garder la force du désir qui nous lie au delà de nos épuisements, de nos peurs.

La certitude d’être tienne me permet de m’ouvrir, d’oublier mes craintes, de les laisser s’envoler.

Échappons-nous, lovons nous l’un en l’autre dans le rouge de nos cœurs pour souffler encore sur le brasier de nos âmes.

Chacun de tes sourires abandonne, à son insu, une bribe de toi en moi. Ces bribes sont devenues un jardin fou, une forêt où chaque arbre porte un souvenir de nous. Je m’y promène à ma guise, toujours ébloui par ces instants passés ensemble et par l’espérance de ce qui nous reste à vivre.

Rêves oubliés, Léonore de Récondo





S’apprivoiser, déployer sa liberté, se relier, prendre soin, naître à la vie,

la goûter, se donner le temps, le prendre, voyager sur ses terres intérieures, savourer sa fantaisie, créer des chemins, explorer sa légèreté, et sa profondeur, se laisser porter par le souffle, s’éveiller à la parole, engager sa vie, consentir à l’amour, honorer notre dignité, être là


Marie-Laure Choplin